Sonia

de Tatiana Tolstaia

  • Théâtre
  • Spectacle
Archive 2008

Alvis Hermanis

Riga

Sonia © Christophe Raynaud de Lage / Festival d'Avignon

Présentation

Alvis Hermanis dirige le Nouveau Théâtre de Riga, en Lettonie, depuis bientôt dix ans. À 42 ans, il est à la tête de cette institution d'État, pourvue d'une troupe permanente de vingt-cinq comédiens, dont une partie de la programmation est consacrée au répertoire classique, surtout des auteurs allemands et russes. Par ailleurs, il monte des textes plus contemporains, comme Sonia de l'auteure russe Tatiana Tolstaia ; il met également en scène des spectacles inspirés d'éléments de la vie concrète, tel Long Life, sans doute sa création la plus connue, ayant bénéficié d'une importante tournée internationale, pièce qui propose des séries de variations mélancoliques autour de la vie des vieillards et de leur vision du monde si particulière. Les spectacles d'Alvis Hermanis et du Nouveau Théâtre de Riga sont le plus souvent des créations personnelles et collectives avec les acteurs, nées de différentes sources d'inspiration, de leur propre expérience, de la littérature, comme La Glace de Vladimir Sorokine ou encore l'album de Simon and Garfunkel, The Sound of Silence. Le théâtre d'Alvis Hermanis illustre une forme inventive de synthèse entre deux filiations contradictoires : la dramaturgie germanique, architecturée, pensée, abstraite, raisonnée, et l'espace du jeu russe, décalé, éclaté, désordonné, parfois encombré d'une certaine folie. Le travail de Hermanis avec ses acteurs, point essentiel de sa démarche, semble constamment tendu entre ces deux lignes.

Tatiana Tolstaia est née en 1951 à Saint-Petersbourg. Elle est issue d'une famille marquée par une riche tradition littéraire. Après des études à l'université d'État de Leningrad, elle s'installe à Moscou où elle travaille dans une maison d'édition avant de se consacrer entièrement à l'écriture. En tant que journaliste, Tatiana Tolstaia a écrit sur la littérature mais aussi sur les événements actuels en Russie. Aujourd'hui, elle vit et travaille entre les États-Unis, où elle enseigne à l'université, et la Russie. Elle est reconnue comme l'un des plus grands écrivains russes actuels.

Deux hommes au physique mal dégrossi pénètrent dans un appartement désuet, jouant devant nous des personnages avec une virtuosité époustouflante. L'un se transforme en Sonia, une femme pleine de contrastes, voire de contradictions: rêveuse, solitaire, romantique, innocente et naïve, mais également femme d'intérieur, briquant la vaisselle, cuisinant ses gâteaux, prête à tous les sacrifices. L'autre est une sorte de projection bien réelle et imaginaire des hommes qu'elle n'a pas eus, mais aussi l'incarnation de cette société cruelle qui la manipule, lui fait du mal, et la conduit jusqu'au désespoir, jusqu'au mélodrame. La féminité est omniprésente alors que la femme est pourtant absente du plateau. C'est la volonté de vivre dans un rêve, tout en affrontant vaillamment l'ordinaire et la misère de l'existence, qu'illustre ce spectacle. Sa force vient de sa radicale simplicité : deux hommes pour jouer le monde entier, à la Beckett, qui passent d'un registre à l'autre avec une facilité étonnante – du burlesque au tragique, du drolatique au pathétique, du rêve d'amour au sentiment prenant de la mort –, et un décor ordinaire, banal, reconstituant jusqu'à l'obsession fétichiste un intérieur russe sans éclat des années trente. Si bien que Sonia offre le présent rare d'un spectacle autonome, qui se suffit à lui-même : tout s'engendre sans artifice extérieur ni coup de théâtre forcé. Comme si, par emboîtement des histoires, intrication des destins, mélange des registres, l'existence pétrifiée de ces deux hommes pouvait soudain reprendre vie sur scène. Avec rigueur, selon un joyeux bricolage de gestes et d'objets, tout s'enchaîne dans l'invention d'une figure imaginaire, qui semble à la fois la clé et la malédiction du spectacle.

Distribution

mise en scène: Alvis Hermanis
avec: Gundars Abolins, Jevgenijs Isajevs
décor et costumes: Kristnine Jurjane
son: Andris Jarans
lumières: Krisjanis Strazdits

Production

coproduction: schauspielfrankfurt, Jaunais Rigas Teatris
avec l'aide de: l'Onda pour les surtitres

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Photos

Audiovisuel

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