Ce que parler veut dire

Le Théâtre des idées

  • Théâtre des idées
Archive 2007

Animé par Nicolas Truong

Présentation

avec

Alain Bentolila linguiste

Barbara Cassin philosophe et philologue

Au commencement du théâtre, le verbe s'est fait chair, la parole s'est incarnée dans le corps d'acteurs venus dire le monde aux spectateurs assemblés. Mais peut-on dévoiler l'essence du monde à l'aide du langage ? Et qu'est-ce que parler veut dire, à l'heure du règne de la communication universelle ? Faut-il ouvrir les dictionnaires au vocabulaire des classes populaires ou casser les ghettos linguistiques ? Toutes les paroles se valent-elles ? Avec Ce que parler veut dire (Fayard, 1982), Pierre Bourdieu avait montré comment la langue et la parole étaient aussi bien des outils de communication que des signes extérieurs de richesse et des instruments de domination. Et de citer le poète Francis Ponge : “C'est alors qu'enseigner l'art de résister aux paroles devient utile, l'art de ne dire que ce que l'on veut dire. Apprendre à chacun l'art de fonder sa propre rhétorique est une œuvre de salut public”. Aujourd'hui, la communication triomphe et l'acheminement vers la parole s'avère incertain, fragile, précaire. À la fracture sociale semble s'ajouter une fracture linguistique qui divise et distingue. Pour le linguiste Alain Bentolila, “lorsque la parole et l'écriture ont perdu leur pouvoir de transformer pacifiquement le monde et les autres, d'autres moyens s'imposent pour imprimer sa marque”. En résumé, les individus en viennent aux maux lorsque les mots leur font défaut. Le verbe est donc ce qui peut résister à la “barbarie”, soutient-il. D'où l'importance d'apprendre très tôt aux enfants en situation d'insécurité linguistique ce que parler veut dire, c'est-à-dire à s'adresser à ceux qui ne pensent pas comme nous. Car, comme nous l'apprend la réflexion sur la sophistique menée par Barbara Cassin, le langage est performatif, il “fait” quelque chose, il fabrique de la politique et du monde commun. Il a pu même être le vecteur d'une politique du pardon, comme l'ont montré en Afrique du Sud les travaux de la commission “Vérité et réconciliation”. Un dialogue sur la parole poétique, politique et dramatique.

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